Signes cliniques et manifestations comportementales de la dysthymie chez le chien
Dans tous les cas, la dysthymie est caractérisée par des phases productives, se traduisant par la survenue brutale et répétée de périodes avec une élévation du niveau de vigilance et d’activité.
Les crises apparaissent le plus souvent entre 1 et 4 ans, sur un chien dont le comportement a pu être tout à fait normal jusqu’à la première crise.
Les crises sont caractérisées par un changement brutal du chien dont les pupilles vont se dilater (mydriase). Pendant la crise, il est hypervigilant et hyperexcitable. Il peut s’agiter, produire des agressions brutales et sans contrôle dès le premier épisode.
Les propriétaires ont alors l’impression de ne plus reconnaitre leur chien, qui peut présenter des comportements ambivalents de recherche de contact et de menace, des stéréotypies, de la garde d’objets et semble ne plus les reconnaitre. De l’hyperphagie et de l’hyposomnie peuvent aussi accompagner ces phases.
Les crises sont irrégulières, et leur durée est très variable (de quelques minutes à plusieurs semaines).
Dans le cas de la dysthymie unipolaire, le chien va redevenir normal entre les crises.
Par contre, dans la forme bipolaire, les crises vont laisser place à des épisodes dépressifs avec une attitude de retrait et des réveils brutaux en début d’endormissement.
Motifs de consultation lors de syndrome dissociatif chez le chien :
En très grande majorité la consultation de comportement est motivée par la survenue brutale d’un ou plusieurs épisodes agressifs. La violence des agressions dès la première crise ainsi que l’impression de ne plus reconnaitre son propre chien sont des éléments très traumatisants pour les propriétaires. Le sentiment que le chien est fou et complètement disconnecté de la réalité est également fréquemment rencontré.
Comment explique-t-on le développement de la dysthymie chez le chien ?
Dans les maladies psychiatriques un support génétique est fortement suspecté. Ainsi, des races comme le Cocker semblent posséder des lignées de chiens dysthymiques.
Cependant, comme dans beaucoup d’affections psychiatriques, il est possible que selon les conditions de vie de l’animal la maladie s’exprime ou à l’inverse reste silencieuse (effet épigénétique). Ces facteurs possiblement déclencheurs ne sont pas encore connus à ce jour.
Comment confirmer le diagnostic de dysthymie chez le chien ?
Le diagnostic de dysthymie chez le chien répond à des critères précis recherchés dans le cadre d’une consultation spécialisée de comportement. Il nécessite parfois plusieurs consultations pour être porté : la réponse au traitement proposé peut aussi être un facteur déterminant.
Le diagnostic de certitude ayant des conséquences importantes pour le chien et sa famille (mesures de sécurité strictes à observer, traitement à vie), il est important d’envisager les autres hypothèses possibles avant de conclure à une dysthymie (par exemple une sociopathie instrumentalisée, un trouble neurologique,…)
Traitement de la dysthymie du chien
Le traitement de la dysthymie du chien repose sur :
Un traitement médical
Un traitement médical est indispensable durant toute la vie du chien. Dans les meilleurs cas, il permet de contrôler parfaitement les crises et d’avoir un chien « normal » au quotidien. Dans certains cas, les améliorations n’empêchent pas d’observer des crises (souvent plus rares et moins intenses). Enfin, certains chiens ne répondent à aucun traitement médical.
Un traitement comportemental
La qualité de vie du chien et la diminution du risque pris par la famille vont être au centre des mesures de thérapie.
La thérapie comportementale va donc toujours inclure des mesures de sécurité qui vont permettre d’envisager la vie à long terme avec le chien, même en cas de crise. Ces mesures comprennent par exemple la mise en place d’une muselière lorsque le chien est en contact avec des personnes vulnérables, la création d’un espace (pièce, enclos,…) dans lequel l’animal peut être isolé pendant les crises. Par ailleurs, le cadre de vie est souvent modifié avec des exercices visant à donner au chien un cadre de vie prévisible et respectueux de ses besoins physiologiques.
Pronostic de la dysthymie du chien
Le pronostic de la dysthymie du chien est réservé tant que le traitement n’a pas été essayé. Certains chiens diagnostiqués dysthymiques vivent une vie entière de bonne qualité, d’autres, malheureusement, ne répondent pas aux traitements et doivent être euthanasiés (risque important pour la famille et qualité de vie insuffisante pour l’animal).
AUTEUR
DR BEATA, Spécialiste en comportement animal
RÉFÉRENCES
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