Dernières directives de l’AAHA sur la Gestion de la douleur chez le chien et le chat (Gruen et al JAAHA 2022).
Ces recommandations sont le fruit d’un consensus entre experts d’Amérique du Nord et elles nous éclairent dans certaines évolutions récentes du traitement des douleurs chez les chiens et les chats.
Les douleurs musculosquelettiques (arthrose notamment) sont la cause la plus commune de douleur chronique chez les chiens et les chats, avec jusqu’à 40% des chiens et 50% des chats atteints. Une détection précoce de la douleur par les propriétaires et les vétérinaires ainsi qu’une gestion proactive est alors primordiale.
La présentation et la gestion de la douleur diffèrent entre les chiens et chats, ainsi qu’entre les formes aigues et chroniques. En effet, lors de douleurs chroniques (supérieure à 3 mois), des changements progressifs de comportement peuvent survenir. Il faut prêter attention à la posture, la démarche, le comportement, en plus de l’examen orthopédique. Certains comportements spécifiques aux félins peuvent être atténués davantage au domicile, d’où l’importance de la sensibilisation des propriétaires à reconnaitre et surveiller ces signaux (et de les prendre en vidéo). Par exemple, lorsque la douleur limite les sauts en hauteur (comportement typique du chat), des changements d’humeur et de sociabilité sont souvent aussi observés. Dans les deux espèces, la priorité doit être donnée à la gêne et aux modifications du comportement de l’animal plus qu’à l’aspect radiographique des lésions constatées.
L’évaluation de la douleur aigue chez le chat repose sur une combinaison de palpation, examen orthopédique et des grilles d’évaluation de la douleur. La « feline grimace scale » comporte également une version pour les propriétaires, se focalisant sur les changements comportementaux et d’activité quotidiennes. Le « client specific outcome measures » (CSOM) est un questionnaire se basant sur des activités prédéfinies qui semblent être impactées par la douleur chronique de manière propre au patient afin de constater l’évolution au cours du traitement.
Il convient, en prévention d’une douleur aigue planifiée, d’utiliser de l’analgésie préemptive et multimodale (opioïdes, AINS, anesthésie locale, alpha-2 agonistes, valence analgésique viscérale du maropitant, cryothérapie, nursing, …).
La douleur chronique pose un défi, car elle peut amplifier la transmission de la douleur. Une gestion multimodale est d’autant plus importante, avec une réévaluation et adaptation du plan thérapeutique tous les 3 à 6 mois. Les traitements doivent être utilisés par ordre d’efficacité prouvée.
Ce conscensus propose d’utiliser en priorité, étant donné leur niveau de preuve, les AINS et les anticorps monoclonaux anti-NGF. Pour les mesures non-médicamenteuses sont recommandées en priorité car les mieux prouvés : oméga 3, activité modérée régulière, modifications environnementales, gestion du poids, et certaines chirurgies.
Les mesures un peu moins établies par des preuves scientifiques incluent la physiothérapie et les traitements spécifiques pour certaines pathologies. D’un point de vue médicament, la gabapentine est dans cette catégorie.
Finalement, les traitements manquant d’éléments de preuve incluent le tramadol, les autres compléments alimentaires, notamment.
Le cout versus bénéfice de chaque traitement doit être évalué, notamment vis-à-vis du confort, de la complexité des traitements, ainsi que la charge sur le propriétaire.
Finalement, ils notent que l’observance augmente avec la compréhension des propriétaires. Il est donc important de donner des instructions claires à l’oral comme à l’écrit, modifiées en fonction de la progression de l’animal, mais aussi de montrer comment administrer les médicaments.
La gestion de la douleur repose sur une responsabilité partagée entre le professionnel de la santé et le propriétaire, il est donc important de donner un rôle actif aux propriétaires et de les sensibiliser aux signaux d’alerte afin d’améliorer les résultats de la prise en charge.
J Am Anim Hosp Assoc. 2022 Mar 1;58(2):55-76.
2022 AAHA Pain Management Guidelines for Dogs and Cats
Margaret E Gruen, B Duncan X Lascelles, Elizabeth Colleran, Alison Gottlieb, Jennifer Johnson, Peter Lotsikas, Denis Marcellin-Little, Bonnie Wright